THÉO LESOUALC’H
que l’ombre qui résonne
que le crissement
que le chant aigre
que le lieu d’une odeur déjà passée
que l’aube
que l’autre
que quelqu’un
que le téléphone qui tinte
que l’ombre
qu’un timbre
qu’un écho
que l’intervalle entre deux sonneries
que l’espace en attente
que la voix qui se tait
que l’ombre entassée
qu’en un éclat
que le trébuchement au même endroit exactement du chemin
que ce même fossile ... blanc
que des griffes par centaines et plus
qu’un coup de feu au loin qui claque
(cependant humain)
qu’un miaulement
que le cri incertain
que le regard posé sur le masque d’une pierre
que la présence toujours de milliers de regards de masques
en percées vers des vides encore plus vides
que par delà le bleu peut-être d’un ciel déjà ancien
qu’une impression de savoir tout cela cependant
que le désir reptile du corps
futile de s’effacer
que fugitif
que fragile se brise la coquille
que le temps d’un retour à un autre temps
que le temps d’une porte ouverte
que le temps d’oublier
que le temps de gravir des marches
que le temps au noir
que le silence
que l’ombre
que la longue distance de l’absence
que par le hasard
qu’en matière d’avatar
que tristement
que de passage
que maintenant et maintenant seulement
que comme se déplie l’envie
que comme aussi quelque part un trou grand plus grand
que n’importe quel contenu imprévu
que le temps du mouvement suivant
que la seconde de l’invitation
que mon hésitation
que le miracle
qu’un obstacle
que comme une flamme d’un feu allumé
que d’un jeu qui se répètera ombre et ombre de jeu
que comme un enlacement membres relâchés
que comme l’image lacérée
que répétition de la réplique d’un unique drame inscrit
dans son contretemps en passe de dévoyer la chose
retombée
qu’encore rien ne signale
que rien encore n’annule
que rien ne condamne
que corps perdu corps harassé corps étendu de tout
son long et harnaché pour d’autres rivages et paré
pour ses dérives
que cette seconde même du réel du réveil où le corps
réapprend le langage
que comme si rien n’était
qu’un identique flottement
qu’une phrase de la veille devenue imprononçable
que sable
que l’irremplaçable
qu’une remontée du fond du corps
que la vérité dans la bouche à peine d’une source
lente de salive
que la sensation d’appartenir aujourd’hui à l’élément
liquide
que la hantise de l’assèchement
que l’hébètement
que trop de lumière
que soif
que vent
que l’arbre
que la surface du sol où le pied ne saura jamais se poser
janvier 88