Alain JÉGOU

 

c’est trop vioque dans le phrasé

presque édulcoré

emmitouflé

comme autour des couilles

une belle paire de parenthèses

 

avec quels vocables frimer

qu’il faut le dire de toute urgence

qu’atteindre ce niveau

et ne rien établir d’autre

que dans la définition du définitif

 

certains ont des mots plein les fouilles

qui sempiternellent la façon

et c’est bien mis

d’entre eux que le verbe bien ajusté

c’est essentiel

puisqu’il existe une règle à respecter

 

la poésie a ses ourses

c’est pourquoi la plupart des poètes

écrivent avec un tampax

 

j’ai pas mal d’écume dans le cigare

c’est pas normal

d’où les mots qui gerbent parfois

ça peut se comprendre lorsque le temps est dur

plutôt qu’aligner des mots qui mollusquent

tellement souvent

j’ai quelques écarts de langage

comme de cracher au vent

c’est un peu bravache mais tellement lénifiant

 

et puis par bribes de lancinances

ébahi dans la tourmente

comme une chanson d’abysses qui rôde

autour de moi

 

c’est trop grand

trop important

toute cette flotte

 

j’arrive pas à toujours raidir de mon ventre

c’est épuisant

 

j’arrive jamais à balancer toutes

mes fusées dans le bon ordre

 

j’arrive pas à pinailler ma vie

comme je le devrais

c’est con

trop entier

avec cette montée de moi

qui remonte encore plus

comme mortalité

presque futuriste pour le causer

m’établir fixe

rêve calibré à outrance

comme dans les revues

 

« j’arrive » disait Brel

 

aussi vioque dans ma peau

que sous les lèvres sensuelles

des sangsues

c’est bandant

de sentir et savoir toute cette ferveur

amoureuse autour du gland

mais ça ne lessive que la chair

et la chair c’est tellement triste après

quand le cerveau reprend son lest

 

c’est peut-être mal aussi

que de fournir à la postérité

de tels états d’esprit

avec tous ces gravats dans l’âme

c’est presque pardonnable

cependant

mal jugé

qu’il faut être louffe pour insister

qui persiste et vit

malgré ce qu’ils en pensent

 

faudrait pourtant pas croire

qu’il suffit de dire certaines choses

pour faire preuve du plus parfait

équilibre

 

comme dans la force des mots

qu’il y a tellement de nébuleux

qui fait naître la nausée

 

Photographie : Théo LESOUALC’H

 

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