LUCIEN HUNO BADER

 

AUTODIDACTES

 

 

...et

QUELQU’UN POUR

crier

dans l’horreur du Néant Pur

un sale goût de mort dans la bouche

des relents sans mélange

le besoin de se défaire du monde

cette vieille peur qui démange

ce cri collé aux dents

ce refus permanent du mensonge

le silence qui tourne

quand le vertige gagne

et son rire demeuré dans la tête

immense bluff

QUELQU’UN

replié

ramassé dans son ombre

soliloque à bâtons rompus

sanguinolence des ténèbres

se fait violence

s’arrachant les mots

les plus gangrénés du corps

fœtus écrasé

sans position

flottant dans l’immobile

pour renaître enfin

les pieds devant.

 

 

 

 

 

La mort qui parle

qui respire par ma bouche

dans mes yeux fixes

l’absence de temps

perpétuel mouron

mouvements brisés

membres cassés

moignons ballants

 

dans l’arrière-fond

du photomaton

UNE CONSCIENCE MASQUÉE

quelqu’un qui sait

 

qui a toujours su.

 

 

 

VIDES les régions du cœur

dans la paleur immaculée

la substance broyée du fou

aux lèpres sanguinolentes

 

Le monde, quelque-part

une vivance en jachère

l’Attente du rire affreux

le temps qui se dérobe

 

Multitudes de nerfs

secouant l’espace

de toutes ses aigreurs

le vent qui boursouffle

 

Apparences sans nom

aux extrêmes de l’entendement

remous qui s’en retournent

aux cavités immondes

 

une sorte de tournis

Le cumul des vertiges

sur des faces en haleine

où le souffle bat

 

 

 

se parle tout seul

les mots tournent

les pensées se cognent

j’ai touché l’abîme

j’ai marché trop longtemps

d’un mur à l’autre

mondes obliques traversés

des minutes entières

dans la foultitude des ombres

où s’assimilent meurtries

les formes antérieures

à la mémoire de l’Œil

je suis passé partout parmi

les fresques enchevêtrées

sur les vitres chiures de mouches

écritures éphémères.

 

 

 

Une ombre déambule sans bruit. Embarrassée dans ses angulations saillantes, empêtrée dans ses mouvements, elle échappe pourtant à toute observation.

Homme ou bête ou les deux. Tente en secret de renouveler son apparence. Encombré qu’il-elle-ça est de ses contours rudimentaires, sortie tout droit de sa propre imagination. Une ombre déambule, membres retournés. Elle songe à sa mort, au retour à l’enfance. Embarrassée dans un corps apparemment sans occupant.

L’ombre souffre d’une inaccessible solitude. Elle a mal dans sa chair quand l’émotivité aveugle et sourde à ses hurlements rentrés déploie froidement son incroyable panoplie d’instruments de torture et autres bizarreries issues de sa tyrannique sensibilité.

Elle a mal sous sa masse éthérée, sous son ventre, sous chaque mur frôlé de trop près. Dépendance de la moindre architecture, à jamais condamnée dans les constructions de sa fantasmagorie.

Déambule dans l’immuable ténèbre, tâtonnant des parois coupées de tout : fondations sans base.

Sans le moindre appui.

Sans un bruit...

 

 

 

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