Jean CARTERET

 

LA LIBIDO

 

 

La libido(*) est la situation terminale — global dont l’appétit est la situation originelle et locale. La libido est la situation permanente et jamais sporadique du devenir révolutionnaire qui est jonction et échange, donc circulation de l’être local d’abord demeure passagère fruit de l’embryon, lui-même passage en devenir révolutionnaire de la conception, de la fécondation, et de la gestation, situations de succession, de procession, et de simultanéité de la naissance dans son parcours déjà en histoire potentielle et de la non-histoire potentielle, et qui passe à la révolution de l’accouchement et du maître du corps physique de l’enfant déterminant de sa psyché collective d’uniques et de son esprit unique de collectifs. Il y a — dans le naître — l’état et l’action de la situation précédente en situation physique et métaphysique du corps — encore seulement réel dans l’embryon — et qui deviendra réalité objective accédant enfin — par la mise au monde — à la manifestation de l’existence de l’être humain subjectif à son origine, fruit de la conception, de la fécondation, et de la gestation toujours interne et intérieure au sein de la mère extérieure et externe. Être humain devenant passage du subjectif à l’objectif lors de son naître — accès à la réalité — qui est encore sa réalité subjective, et accession et accès à la manifestation qui est encore sa manifestation subjective, la libido — lieu du devenir révolutionnaire toujours permanent, parfois subjectif, parfois objectif, fruit — je l’ai dit — de l’appétit originel qui peut être à la fois subjectif et objectif : d’où le fait que la libido — généralement subjective — passe parfois par des situations objectives. Cette libido — donc parfois sujet parfois objet — s’incarne subjectivement et objectivement dans l’être local humain dès sa conception — la fécondation dont il est la situation dialectique en action, et libido qui passera aussi par la gestation de l’embryon de l’être local humain, donné — et même produit — dès la conception et à travers les situations variées qu’il a traversées jusqu’à la révolution de l’accouchement et du naître.

Et la libido poursuit sa situation et son œuvre — toujours lieu du devenir révolutionnaire parfois sujet, parfois objet, état, action, oction (sic), œuvre ou chef d’œuvre, mais passant par des situations de réactions statiques déterminantes ou déterminées, et par des réactions dynamiques déterminantes et déterminées, puis aussi par des situations de passions statiques déterminantes ou déterminées, et de passions dynamiques déterminantes et déterminées — donc devenir révolutionnaire, éventuellement réactionnaire — capable d’accéder à des révolutions et à la révolution, capable aussi d’accéder à des réactions et à la réaction. Donc, devenir global en demeure et en véhicule, agissant ou agi au sein de la libido, jonction et échange de circulation de présence, de rapport, de relation, et de contact — au singulier comme au pluriel, ou au singulier qualitatif et à l’universel qualitatif. Libido passée de l’essence jusque et à l’exclusion de l’accouchement et du naître, à l’existence du bébé devenu et devenant enfant, puis adolescent, puis jeune — de façon transcendante par rapport à l’adolescence, et immanente par rapport à l’enfance — libido qui passe de la maturation progressive et discontinue du progrès, succession, procession et simultanéité de la jeunesse originelle qui peut s’augmenter, se développer, et s’intensifier selon la disponibilité éventuelle — et parfois passagère seulement — du bébé, de l’enfant, de l’adolescent, du jeune toujours — mais à l’état d’avoir de la jeunesse et qui pourtant en même temps devient jeune — puis par le statut de l’adulte, de sa maturation, toujours présente dès l’origine conceptuelle de l’être humain local donné et construit, mais devenant et grandissant à la maturité de l’homme mûr, jusqu’à l’homme vieux devenu rare dans la situation du vieillard où la jeunesse — donnée dès la conception — s’est augmentée, s’est développée, et s’est intensifiée à travers toutes les situations variées et successives et processives et éventuellement simultanées, de la conception, de la fécondation, de la gestation, subjectives toutes jusqu’au degré enfin objet et sujet de l’accouchement, objet et sujet au cours du naître, objet et sujet dans le parcours qui passe de sa réalité subjective à la réalité objective, de l’essence intersubjective dès la conception à son existence intersubjective — plus subjective à l’existence — toujours intersubjective où l’objet l’emporte sur le sujet, à sa manifestation intersubjective — toujours — mais où le sujet l’emporte sur l’objet, et à la manifestation intersubjective où l’objet l’emporte sur le sujet. Manifestation intersubjective qui accède — à la fin — au mourir où s’efface progressivement la libido au cours de l’agonie, puis totalement au moment de mourir.

Mais la libido intersubjective réapparaît au passage du mourir à la mort — où l’essence, intersubjective dans l’existence et la manifestation, essence dans la psyché subjective et dans l’esprit objectif — réapparaît, resurgit dès l’instant ou les instants du passage du mourir à la mort, où l’essence — toujours naturelle et surnaturelle dans l’existence, mais plus naturelle que surnaturelle — devient — dans la mort — essence surnaturelle, et non plus naturelle, de la psyché et de l’esprit qui passent de l’essence unique à l’essence collection lors de l’insertion de l’essence surnaturelle des deux dans un corps subtil — mais non physique — mais métaphysique de l’esprit et métapsychique de la psyché, germe déjà du germe à venir lors de la résurrection — après l’apocalypse — dans l’apparition du corps glorieux qui passe de la naissance au naître, et du naître à l’essence permanente qu’il est dans son réel — sans encore de réalité — mais qui accèdera à la réalité nouvelle transmutée du réel, et à la manifestation nouvelle transmutée de la réalité. Mais le corps glorieux, qui est toujours à l’état d’essence — même dans son réel et sa réalité et sa manifestation ultérieure et nouvelle — passera à l’état d’existence par les conquêtes successives de ses situations progressives de consciences variées — y compris l’accession à un nouveau Je transcendantal où l’essence du corps glorieux devient existence incarnée de toutes les puissances de la puissance, de tous les pouvoirs du pouvoir absolu.

C’est alors — comme je l’ai déjà écrit — que l’éternel absolu devient éternel relatif, et que l’éternel absolu devient infini relatif : c’est alors que disparaissent les dieux, le dieu notre seigneur du Verbe non incarné, la déité absolue du principe non incarné, au profit de la divination de l’humain, de chaque humain, et de tous les humains, de chaque chose du cosmique, et de toutes les choses du cosmique. On passe alors à la disparition de notre univers actuel, des dieux, de dieu, et de la déité, et des galaxies possibles et impossibles, du système solaire, et de la Terre elle-même devenue Jérusalem céleste — c’est-à-dire en demeure — dont les corps glorieux en sont chacun le véhicule extérieur et intérieur, externe et interne, capable d’accéder du Terrestre de la Jérusalem céleste de la Terre au ciel — déplacement par le vol surnaturel et non plus naturel, vol conquis par le corps glorieux : c’est alors que le corps glorieux de chacun — Esprit et psyché créés par le corps glorieux — devient capable d’un nouvel univers unique, par intuition immanente suprême et ultime, et par l’œuvre suprême et ultime, et par le chef d’œuvre suprême et ultime qui divinise le corps glorieux de chacun ; chacun — corps glorieux en essence et en existence — étant donc capable d’un nouvel univers unique, tout devient — par le collectif de chacun de tous — un collectif d’univers chacun unique : alors toute distance disparaît au profit de la coïncidence, mais coïncidence capable — malgré tout — de distinction de ses composantes. Alors la vitesse illimitée de la lumière et de sa clarté est dépassée par la vitesse immédiate du surplace du véhicule : c’est là où l’intuition devient capable d’œuvres et de chefs d’œuvre immédiats. Je l’ai dit : le corps glorieux — essence et existence — devient — par le vol — capable de la vitesse illimitée immanente de la vitesse démesurée de la lumière. Donc le corps glorieux devient capable du surplace.

Le corps glorieux — son essence et son existence — qui était seulement quelque part et un certain temps en tout lieu, accède à la vertu christique du partout et du toujours de l’infini relatif incarné dans le corps glorieux — corps glorieux enfin divinisé à la situation d’état et d’action qu’il était déjà dans sa situation d’essence et d’existence alchimisée lors de sa présence, de ses rapports, de ses relations, de ses contacts — donc dans la situation de jonction et d’échange, donc de demeure et de véhicule, véhicule, lui, en circulation : donc, passage du ici maintenant du corps glorieux en essence et en existence dans le quelque part et quelque temps dans la Jérusalem terrestre en relation avec le ciel par le vol, donc passage du ici et du maintenant au partout et au toujours de la situation permanente d’infini relatif incarné et d’éternité relative incarnée de la situation enfin atteinte pour toujours et pour partout de la situation christique après son ascension.

 

La libido — née dès la conception et traversant toutes les situations énumérées ci-dessus — est parfois sporadique, même au sein de l’inconscient, et parfois permanente ; elle devient permanente et immanente pendant la mort après le mourir, pendant la résurrection, pendant l’essence du corps glorieux, et permanente, toujours immanente dans le passage de l’essence du corps glorieux à son existence. Mais libido qui continue et qui persiste dans la situation christique où elle est source de la créativité et de la création, et même de la manifestation. Elle est même toujours permanente — et non plus sporadique — mais toujours immanente lors de la créativité, de la création et de la manifestation de l’univers Nouveau et unique de chacun en situation de corps glorieux en essence et en existence. Univers nouveau et unique, contemporain de tous les univers nouveaux et uniques chacun, dont l’ensemble global est le collectif par excellence — immanence suprême et ultime de tous les Je transcendantal et de tous les Nous transcendantal : je découvre enfin que la libido est déjà à l’origine de toutes les origines, donc origine de la déité absolue, non-être de l’être en état — donc principe — et de dieu absolu, non-être et être absolu en action — donc Verbe non incarné — cette libido — origine suprême et ultime, immanence suprême et ultime — c’est l’énergie immanente, suprême et ultime, contemporaine du principe lui aussi immanent de non-être en être en état, c’est-à-dire la lumière absolue — celle de la connaissance par excellence — connaissance absolue de toutes les autres connaissances relatives. Libido contemporaine du Verbe lui aussi immanent du non-être en être en action, c’est-à-dire chaleur absolue et amour absolu : donc elle aussi — comme la lumière absolue — est l’entropie de l’énergie originelle dont elles sont toutes contemporaines et simultanéités. Le dépassement de la lumière absolue, c’est la clarté. Le dépassement de l’amour absolu, c’est la tendresse. L’énergie — qui s’appelle aujourd’hui libido dans la psychanalyse, dans le cours de l’existence de l’histoire et de l’essence de la non-histoire — est la source de deux entropies dont la déité absolue en est la verticale et le principe, et dont dieu — avec la chaleur absolue et l’amour absolu et la toute puissance — est l’horizontale de l’énergie qui en est la croix ; la lumière absolue est la connaissance absolue qui n’est pas encore en situation de clarté, mais le deviendra par le passage à l’existence de l’être local puis du conscient local du subconscient local qui sont tous deux l’horizontale du passage du réel à la réalité, alors que le surmoi local et l’inconscient local sont l’axe vertical, dans le passage de la réalité au réel : donc le surmoi — pour l’être local et donné — est un Dragon dont l’inconscient — à la fois naturel et surnaturel de l’être local donné et de son conscient — est passage aussi, à notre insu, d’une réalité à un réel non vécu mais présent.

Ainsi l’inconscient — dans son passage de passion déterminée au conscient — devient passage à la situation de refoulé : l’inconscient est le lieu de la Bête. Le surmoi — dans son passage de réaction déterminante statiquement et dynamiquement — devient situation de refoulant : le surmoi est le lieu du Dragon. Donc le Dragon et la Bête sont ensemble virtualité de la conscience : ce conscient et le subconscient sont le lieu de la potentialité de la conscience ; et le passage du conscient, du subconscient, du surmoi, et de l’inconscient sont passage à la conscience réelle, mais pas encore réalité.

L’accession à la prise de conscience est dynamisme et action par rapport au statisme de la conscience en situation réelle — qui est état : donc l’état du réel de la conscience statique est situation de largeur de l’axe horizontal de la croix à trois vecteurs. L’action de réalité de la conscience dynamique est situation de longueur du trait horizontal de la croix — mais toujours sur le plan de l’état et de la conscience. La prise de conscience est donc la verticale — l’axe vertical de la croix à trois vecteurs : le centre de ces trois vecteurs est accession à la conscience de conscience en situation statique ; mais lorsqu’on opère la rotation du centre sur lui-même, on accède à la situation dynamique de la conscience de conscience, qui devient germe de la conscience absolue de conscience relative dont le dépassement sera l’état statique du Je transcendantal qui devient le germe de la situation statique de l’état de l’être global : alors ensuite, passage de la situation statique de l’état de l’être global à la situation dynamique de l’être global : cet être global devient l’origine de nouvelles situations successives de conscience transcendantal à la conscience immanente — celle d’un nouveau Je transcendantal qui n’était précédemment que l’état du Je transcendantal — à l’accession à la situation dynamique et action du Je transcendantal, et qui précède encore l’immanence du Je transcendantal qui peut se produire exceptionnellement et miraculeusement pendant l’existence pour quelques-uns seulement, devenus chacun quelque chose d’unique au sein d’un collectif possible des autres accédant à cette situation suprême et ultime.

L’énergie originelle — origine de toutes les origines — est dynamisme originel ; elle comprend les deux entropies qui sont simultanéité, mais en situation statique en entropie de la lumière absolue de la connaissance absolue, pourtant état externe en action interne du principe entropie — situation toujours statique de l’état externe de l’action interne du Verbe qui est chaleur absolue et amour absolu qui n’est pas encore tendresse absolue, mais qui deviendra tendresse absolue dans la situation unique du Christ — incarnation du Verbe et du principe — et qui deviendra tendresse absolue — mais collective — dans le christianisme qui en est le sujet, le réel, et dont les chrétiens deviendront chacun l’objet surtout, et ensuite le sujet du passage du réel à la réalité de cette tendresse absolue de tous les fidèles devenus — ou étant — chrétiens.

 

 

(*) « Tout un travail sur la libido considérée comme énergie essentielle qui traverse tout, et où le corps glorieux — après le Je transcendantal — devient capable — après l’accession à un nouveau Je transcendantal — de créer — chacun — un univers nouveau au sein d’univers collectifs. »

Jean Carteret.

 

 

« Toutes les feintes auxquelles les circonstances me contraignent allongent mon innocence. Une main gigantesque me porte sur sa paume. »

(René Char)

 

 

« Ainsi, de par la nature même du jeu du monde, il nous faut concevoir d’abord une INVOLUTION et une auto-absorption de l’être conscient dans la densité et la divisibilité infinie de la substance car sans cela il ne peut y avoir de variation infinie — ; puis une émergence en l’être formel, en l’être vivant, en l’être pensant formé qui se réalise librement comme l’UN et l’Infini jouant dans le monde et, par cette délivrance, sa reconquête de l’existence-conscience-félicité illimitée que dès maintenant il est déjà secrètement, réellement, éternellement. Ce mouvement triple est toute la clé de l’énigme du monde. »

Shri Aurobindo (La Vie divine)

 

Photographie : Chantal BARBIER

 

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