Gaston CRIEL

 

REINE INVESTIE

 

 

Corolle de ces lèvres

s’ouvrirait le cœur

si l’épine des bras

n’arrêtait de ses veines

le sang qui bat d’artère.

 

Je sillonne sur la chair

des pulpes de fins rêves

se laissent traîner

des parfums de soir bleu.

 

Jardin propice

aux précieuses caresses

j’admire ton reflet

sous les doigts voyageurs

tactilité durable

d’essences essentielles

se grisant de musc

des ongles purpurins.

 

J’attends la fin du jour

dans la nuit de glace

pour glisser en eau trouble

aux baisers des paupières.

Long regard sibyllin

dont sourit l’âme éprise

des flexibles beautés

dont tu tiens le mystère.

 

Reine perdue des terres inexplorées

j’achète en ton sillage —

à l’ange des nuits

qui veille ton haleine —

le droit de vivre

aux brises de tes voiles

je rame en chantant

vers le port défendu.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ils étaient assis au bord du silence

commentant lourdement

le manteau des journées.

 

Les roses ne poussent pas sans épine

l’amour sans le chagrin.

Pourquoi ces souvenirs

d’une vie trépassée.

 

Dans le petit jardin

dans la serre aux cactus

ou dans la roseraie

rien

ne viendrait sourire

à la vie délaissée.

 

Ils s’éloignèrent

de la jeunesse morte

laissant seule une ombre

qui pleurait ses vingt ans.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Penché sur la plage du sommeil

le pécheur cherche les algues

du sommeil endormi.

Le flux des jalousies éteintes

réveille le dormeur des marées de printemps

aux longs cris qui sillonnent le temps.

Les soupirs exhalés du noyé anonyme

achèvent d’expirer dans le port du cimetière marin.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Brisant les cris perçants d’enfants qu’on étrangle, de longs coups sourds ébranlent la porte de la mansarde cernée de vent.

 

 

La tête couverte de sang, un homme demande asile. La femme l’a balafré à coups de couteau. La lame giclant dans la nuit apparaît, rapide : « Il faut abattre, dit l’homme ».

 

 

On lance une chaise à travers l’escalier.

 

 

Le couteau tournoie et vient se planter dans le pied de l’homme qui hurle avec les enfants, avec le vent qui cerne la mansarde, avec le chien qui mange la mort.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SQUELETTE aux DENTS ROSES

 

 

Le squelette d’azur

laissait derrière ses dents roses

dévider le souffle bleu

au parfum d’arc-en-ciel

dans la bouche d’or

des séjours printaniers.

 

Elle avait épars

en ses mains diaphanes

diapré mouvement

en rêves élizabéthains.

 

Jeunesse ensevelie

dans les rues surannées

que berce le blanc et noir

des pianos fêlés.

 

Garde-moi

dans l’écharpe d’or

le squelette ploie

dans la grâce qui meurt.

 

 

 

 

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